jeudi 15 janvier 2009

Le corps et la voix

Je m'attaque maintenant à un sujet délicat. Dans le cadre de la formation professionnelle de l'IUFM, nous avons à choisir un axe composé de trois formations, et j'ai justement eu la première jeudi dernier. Le titre de cet axe est "Le corps et la voix".

En tant qu'enseignant le premier outil de notre travail est, tel un choriste adulé par la foule intellectuelle d'une grande ville, notre voix. Et qu'est-ce qui produit notre voix ? Le corps bien entendu. Ainsi pour pouvoir tenir notre carrière sans nous détruire la voix, il faut apprendre à utiliser son souffle et ses cordes vocales.

Pour cette formation nous sommes mélangés entre les différents groupes, et nous sommes convoqués dans un nouveau centre dans lequel je n'ai mis les pieds qu'une fois, une dizaine de mois plus tôt. J'arrive donc le matin avec un collègue et nous partons dans les méandres de l'établissement à la recherche de notre salle. Nous sommes peu devant cette salle, et même lorsque le formateur débarque avec un bon quart d'heure de retard parce qu'il n'avait pas les clefs, nous sommes à peine une dizaine.

Dans un premier temps, notre formateur nous fait comprendre l'importance de la voix dans notre métier. Pendant trente minutes il nous explique ce que l'on sait déjà, mais cela laisse le temps au groupe de passer de dix individus à presque tente. Et oui, même les profs sont en retard. La palme du retard pour la journée est d'une heure quinze.

Le drame est alors prêt à nous tomber dessus. Le formateur nous demande de pousser les tables de façon à avoir l'espace central de la salle complètement libre. Nous commençons à plaisanter sur les figures acrobatiques que nous allons pouvoir faire dans un tel espace. Le premier travail va pouvoir commencer.
Nous allons tous devoir marcher dans la salle, à rythme lent, en se concentrant exclusivement sur notre pas, sur le contact de notre pied sur le sol, sur la position de nos bras, sur notre souffle. Enfin bref, nous devons marcher.
L'important est de ne pas se toucher alors nous marchons vraiment doucement tout en essayant de ne pas rire. Et ce n'est pas simple.

Après dix minutes de ce "travail" (oui dix minutes, j'ai regardé ma montre), on complique l'exercice. Lorsque le formateur nous dit "top", il faut continuer le même chose, mais en allant vite. Et lorsqu'un nouveau top retentit il suffit de reprendre notre rythme zombiesque. Et après quelques changements de rythme, on peut enfin arrêter cet exercice.

Par la suite nous nous présentons tous. Nous devons dire des phrases types telles que "Bonjour", "Comment ça va ?" et "Comment s'appelle ton voisin ?", mais en ajoutant du rythme. Les fous rires ont du mal à ne pas revenir...

L'exercice suivant est intéressant, mais c'est vrai qu'en groupe nous avons l'air un peu bête. Le formateur nous apprend à respirer par le ventre. Il se trouve que pour des raisons particulières j'ai eu à apprendre cette respiration dès le collège et que c'est devenu avec le temps un exercice de relaxation automatique chez moi. Donc j'ai passé tout le temps de cet exercice à observer les autres membres du groupe. Les ricanements, les "je m'en fous", les stagiaires sérieux, franchement il y a de tout dans le groupe. Mais bon, il faut y passer...

On passe enfin aux exercices sur la voix. Et j'aurais préféré ne pas être là. Chacun notre tour nous devons réciter les premières lignes d'une fable de La Fontaine, mais en utilisant trois tons. Notre voix normale, une voix aigüe et une voix grave. Enfin bref nous passons tous notre moment de ridicule. Personnellement je trouve que nous avons déjà sombré depuis longtemps, alors je fais l'exercice avec tout le sérieux que je sais mettre dans un travail.

L'exercice suivant est tout simple, nous arrivons un par un devant tout le monde. Nous ancrons nos pieds dans le sol, nous sentons notre respiration, nous regardons tout le monde dans les yeux, puis nous disons : "Bonjour", "Je m'appelle Y-Prof", "Au revoir". Intéressant non ?

Puis la suite est arrivée. Faire tenir notre note de base le plus longtemps possible, nous donnant l'apparence d'une secte ; souffler sur un fil invisible de façon à le faire voler ; lire des textes en modifiant les rythmes de lecture ; et cætera...

Finalement nous avons passé six heures dans cette formation. Ai-je appris quelque chose ? D'instinct je dirais non, mais c'est peut-être un mouvement de masse qui fait que l'on refuse d'admettre avoir acquis quelque chose en ayant l'air si ridicule.

Enfin malgré tout cela, n'oublions pas que ces exercices sont ceux des acteurs du théâtre alors ça doit certainement être utile. Dans un autre cadre cela aurait pu nous donner une autre perception de cette formation. Qui sait si un jour cela n'arrivera pas, quand je finirai sur les planches d'un autre type de scène.

mercredi 14 janvier 2009

Une première réunion

Le vendredi avant les vacances de décembre (eh oui je suis un peu en retard), j'ai eu ma première réunion avec mon superviseur. Lors de cette "petite fête", il y avait tous les stagiaires supervisés par J-IUFM, et nous devions donner les 3 TEP (Travaux d'Etude Personnelle) qui constitueront le corps de notre dossier de synthèse.

En préambule à cette réunion J-IUFM nous a donné quelques détails d'importance. J'ai déjà expliqué que notre validation passait par trois votes, qui sont celui du directeur de l'IUFM, celui du proviseur de mon établissement, et enfin une voix revient au rectorat.
Nous avons donc été aimablement informés que bien entendu les trois voix suivaient exclusivement la décision du superviseur, c'est à dire de J-IUFM dans le cas présent.

J'ai personnellement trouvé que l'annonce était faite de façon très autocratique. On sait désormais que notre avenir est entièrement dans les mains de notre cher superviseur. Alors la question est celle-ci : Y a-t-il une forme de dictatoriat concernant notre titularisation ou bien n'est-ce qu'une formalité sans que personne n'ait réellement une décision importante à prendre ?

D'après les nombreuses réunions que nous avons eues et les discussions avec les anciens stagiaires, j'ai plus l'impression que c'est seulement ceux qui ont de gros problèmes de gestion de classe qui sont évincés du système.
De toute façon il sera toujours temps de découvrir cela à la fin de l'année.

Une envie insolite

Lors de mes années au collège j’avais une bien mauvaise habitude qui est commune à tous les élèves, ou presque. Lorsqu’en journée mes camarades et moi recevions la consigne d’un devoir à faire sous une huitaine, nous nous empressions de mettre de côté ce parasite voué à dévorer notre temps libre. Ce n’est que la veille ou l’avant-veille que, par un curieux instinct de survie scolaire, le devoir venait se rappeler à notre présence, empli d’une sourde jouissance de nous avoir acculés à un délai des plus restreint.
Nous n’effectuions guère un travail efficace, l’empressement et l’ennui se mêlaient pour tisser un écrit souvent maigre et ignare. Loin d’éprouver une quelconque culpabilité face à ce manque flagrant de bonne volonté, nous nous réjouissions d’avoir terminé ce travail de bas étage qui aurait dû nous emplir d’une confusion méritée.
Bien entendu, étant le modus operandi de tous mes camarades, notre professeur ne pouvait se résoudre à nous sanctionner de façon méthodique et avec toute la sévérité qui était sensé nous échoir. Nous nous contentions des quelques remontrances proférées ainsi que des notes mauvaises mais guère médiocres.
Parfois encore un élève, dans sa précipitation, avait réussi à saisir un des fruits de la connaissance, et obtenait une note s’élevant au dessus de la masse des nôtres. Face aux louanges de notre professeur, nous nous amusions de la grossière erreur qu’il commettait en imaginant, pour ce devoir, une implication de qualité.
Et pourtant nous aurions dû écouter les conseils de tous ces enseignants qui ont jalonné le parcours menant de notre enfance vers notre condition d’adulte. Peut-être que loin de reprendre l’exemple fort peu attractif de cette fable de La Fontaine pour un cas plus concret, nous aurions alors pu comprendre la réelle signification de ce proverbe : « Rien ne sert de courir, il faut partir à point ».


C'est en lisant la nouvelle Le proverbe de Marcel Aymé que j'ai eu l'envie de faire ce devoir qui a valu un 3 à monsieur Jacobin.
J’ai pour ma part toujours pris le contrepied de ce dont je parle. Voulant consacrer mes week-ends à mes lectures, j’effectuais toujours mes devoirs le jour même de leur annonce. L’incongruité de ma démarche a toujours laissé perplexe mes proches, et pourtant c’est bel et bien la façon la plus adaptée pour travailler.
Même si encore aujourd’hui j’essaye de m’astreindre à un tel comportement, j’ai plus de mal à garder la rigueur qui m’était naturelle il n’y a pas si longtemps.
Finalement je dirais que le proverbe qui correspond le mieux à tout cela est encore : « Point ne sert de remettre à plus tard ce que l’on peut faire à l’instant ».